[ Pobierz całość w formacie PDF ]
.— Alors tu as manqué une belle bataille.N’est-ce pas, Haesten ? Une mémorable bataille !— Un massacre sous la pluie, seigneur, opina Haesten.— Et j’en boite encore, dis-je.C’était vrai, même si ce n’était qu’une légère blessure qui ne me gênait guère.On fit approcher trois autres hommes, des Danes.Tous étaient bien vêtus et portaient nombre de bracelets témoins de leurs prouesses.J’ai oublié leurs noms depuis, mais ils étaient venus me voir et avaient amené leur entourage.Je compris quand Haesten me les présenta qu’il tirait orgueil de me connaître.Il prouvait que je l’avais rejoint et qu’ils n’avaient donc rien à craindre en s’alliant à lui.Haesten fomentait une révolte dans ce château.Je le pris à part.— Qui sont-ils ? demandai-je.— Ils ont des terres et des hommes dans cette partie du royaume de Guthrum.— Et tu veux ces hommes ?— Nous devons lever une armée, répondit-il simplement.Je baissai les yeux vers lui.Cette révolte n’était pas seulement contre Guthrum d’Estanglie, mais contre Alfred de Wessex.Et si elle devait réussir, toute l’Anglie devrait se soulever avec la hache, la lance et l’épée.— Et si je refuse de me joindre à toi ? demandai-je.— Tu accepteras, seigneur, m’assura-t-il.— Vraiment ?— Car ce soir, seigneur, le mort te parlera, sourit-il alors qu’Eilaf venait nous annoncer que tout était prêt.Nous allons invoquer le mort ! déclara Haesten d’un ton solennel en touchant son amulette.Et ensuite, nous festoierons.(Il désigna la porte au fond de la salle.) Par ici, s’il te sied, seigneur, par ici.Et nous allâmes voir le mort.Haesten nous précéda dans la pénombre et je me souviens d’avoir pensé qu’il était facile de prétendre qu’un mort apparaissait et parlait dans une telle obscurité.Comment en être sûr ? Nous pourrions l’entendre, certes, mais non pas le voir, et j’allais protester quand deux des hommes d’Eilaf arrivèrent avec des torches qui illuminèrent la nuit.Nous passâmes devant une porcherie.Finan, inquiet, ne me quittait pas d’une semelle.Nous descendîmes vers une prairie auprès d’une grange, puis les torches furent jetées sur des amas de branchages qui prirent feu si vite que les flammes éclairèrent les parois de bois et le toit de chaume.Je vis alors que ce n’était pas une prairie mais un cimetière, parsemé de monticules et clos pour empêcher les animaux de venir.— C’était notre église, expliqua Huda en approchant.— Tu es chrétien ?— Oui, seigneur, dit-il en se signant.Mais nous n’avons nul prêtre.Nos morts sont enterrés sans avoir reçu l’absolution.— J’ai un fils dans un cimetière chrétien, dis-je, me demandant pourquoi je lui confiais cela.(Je parlais rarement de mon fils défunt.Je ne l’avais pas connu.Sa mère et moi étions séparés.Pourtant, je me souvenais de lui en cette nuit noire et humide.) Pourquoi un scalde dane est-il enterré dans un cimetière chrétien ? Tu m’as dit qu’il ne l’était point.— Il est mort ici, seigneur, et nous l’avons enterré avant de le savoir.Peut-être est-ce pour cela qu’il ne repose point en paix.— Peut-être.J’entendis alors un tumulte derrière moi et regrettai de ne pas avoir demandé mes épées avant de quitter le château d’Eilaf.Je me retournai, pensant à une attaque, mais je vis deux hommes qui en traînaient vers nous un troisième, mince, jeune et aux cheveux clairs, les yeux écarquillés.Ses deux gardiens étaient plus robustes, et se débattre était inutile.J’interrogeai Haesten du regard.— Pour invoquer le mort, seigneur, m’expliqua-t-il, nous devons lui envoyer un messager par-delà l’abîme.— Qui est-ce ?— Un Saxon, répondit-il avec désinvolture.— Il mérite de mourir ?La mort ne me rebutait pas, mais je sentais qu’Haesten était prêt à tuer comme un enfant qui noie une souris et je ne voulais pas sur ma conscience la mort d’un homme qui ne la méritait pas.Ce n’était pas une bataille où un guerrier peut toujours espérer gagner les joies éternelles du festin d’Odin.— C’est un voleur, dit Haesten.— Et par deux fois, ajouta Eilaf.J’allai relever la tête du garçon et vis qu’il avait au front la marque des voleurs.— Qu’as-tu dérobé ?— Un manteau, chuchota-t-il.J’avais froid.— Et la première fois ou la seconde ?— La première fois, c’était un agneau, dit Eilaf derrière moi.— J’avais faim, seigneur, dit le jeune homme, et mon enfant n’avait rien à manger.— Tu as volé par deux fois, dis-je.Tu dois donc mourir.C’était la loi, même sur cette terre qui n’en connaissait aucune.Le garçon pleurait, mais il continuait de me regarder.Je faillis céder pour lui épargner la vie, mais je me détournai.J’ai volé bien des choses dans ma vie, et de plus de valeur qu’agneau ou manteau, mais je vole sous les yeux de celui qui possède pour qu’il puisse défendre ses biens de son épée.C’est le voleur qui dérobe à la faveur de la nuit qui mérite la mort.Huda ne cessait de se signer.Il était inquiet.Le jeune voleur cria des paroles incompréhensibles, mais son garde le gifla et il baissa la tête en se contentant de pleurer.Finan et mes trois Saxons serraient dans leurs doigts les croix qu’ils portaient au cou.— Es-tu prêt, seigneur ? me demanda Haesten.— Oui, dis-je en m’efforçant de conserver mon assurance alors que j’étais aussi inquiet que Finan.Il y a un rideau entre notre monde et celui des morts, et j’aurais préféré qu’il reste tiré.Je portai machinalement la main à la poignée de mon épée absente.— Mets le message dans sa bouche, ordonna Haesten.L’un des gardes tenta d’ouvrir la bouche du prisonnier, qui résista.Il fallut forcer avec un couteau pour poser l’objet sur sa langue.— Une corde de harpe, expliqua Haesten.Bjorn comprendra.Tuez-le, à présent, ordonna-t-il.— Non ! cria le jeune homme en crachant la corde enroulée.Il se mit à hurler et pleurer pendant que les deux hommes le traînaient vers l’une des tombes.La lune parut entre les nuages.Le cimetière sentait la pluie.— Non, de grâce, non ! cria-t-il.J’ai une épouse et des enfants ! Non !— Tuez-le ! ordonna Eilaf le Rouge.L’un des gardes enfonça la corde de harpe dans la bouche du messager, puis lui maintint la bouche close.Il tira sa tête en arrière, sans ménagement, découvrant la gorge, que l’autre fendit d’un geste sec.J’entendis un gargouillement et vis le sang gicler dans la lueur des flammes, éclabousser la tombe et les herbes folles.Le corps tressaillit un instant, puis il finit par s’effondrer entre ses gardes, qui laissèrent les dernières gouttes couler sur le tombeau [ Pobierz całość w formacie PDF ]

© 2009 Każdy czyn dokonany w gniewie jest skazany na klęskę - Ceske - Sjezdovky .cz. Design downloaded from free website templates