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.13 Page 16A U P R È SD EM O IT O U J O U R Sfait que nous avions grandi ensemble à Hailsham, que nous savions et nous rappelions des choses ignorées de tous.Je suppose qu’à partir de ce jour-là, pour choisir mes donneurs, je me suis tournée vers les gens du passé, et, dans la mesure du possible, vers les anciens de Hailsham.Au cours des années, il y a eu des périodes où j’essayais d’effacer Hailsham de ma mémoire, où je me disais que je ne devais plus regarder autant en arrière.À un certain moment, j’ai cessé de résister.C’est venu d’un échange avec un donneur en particulier, au cours de ma troisième année de pratique ; de sa réaction quand j’ai mentionné que j’étais de Hailsham.Il émer-geait à peine de son troisième don, l’intervention s’était mal passée, et il devait savoir qu’il ne s’en remettrait pas.Il pouvait à peine respirer, mais il a regardé vers moi et il a dit : « Hailsham, je parie que c’était un endroit magnifique.» Et le lendemain matin, tandis que je faisais la conversation pour lui occuper l’esprit et que je lui demandais où il avait grandi, il a mentionné une ville du Dorset, et sous les marbrures de son visage s’est esquissée une grimace d’un genre tout à fait nouveau.Je me suis alors rendu compte à quel point le rappel de ses origines lui était insupportable.Au lieu de cela, il voulait entendre parler de Hailsham.Pendant les cinq ou six jours suivants, je lui ai donc raconté ce qu’il désirait savoir ; il restait allongé là avec tous ses tuyaux, un doux sourire aux lèvres.Il 16BAT-019-AUPRÈS DE MOI TJRS 28/02/08 16.13 Page 17A U P R È SD EM O IT O U J O U R Sm’interrogeait sur les petites et les grandes choses.Sur nos gardiens, sur les coffres à collection que cha-cun de nous rangeait sous son lit, sur le football, les rounders, le petit sentier qui contournait la maison principale, avec tous ses coins et ses recoins, l’étang des canards, la nourriture, la vue de la salle de dessin sur les champs par une matinée de brouillard.Parfois il me priait de recommencer mon récit encore et encore ; il m’interrogeait sur des choses que je lui avais racontées la veille à peine, comme si je ne les lui avais jamais dites : « Vous aviez un pavillon de sport ? », « Qui était votre gardien préféré ? ».Au début j’ai cru que c’était juste les médicaments, mais ensuite je me suis rendu compte qu’il avait les idées assez claires.Il ne voulait pas seulement entendre parler de Hailsham, mais s’en souvenir, comme s’il s’était agi de sa propre enfance.Il savait qu’il était proche de l’issue, et il avait entrepris la chose suivante : il me poussait à lui faire ces descriptions afin qu’elles imprègnent son cerveau et que se brouille peut-être, pendant les nuits de veille, la lisière entre mes souvenirs et les siens, avec les drogues, la souffrance et l’épuisement.C’est alors que j’ai compris, réellement compris, la chance que nous avions eue – Tommy, Ruth, moi, nous tous.Quand je roule aujourd’hui dans la campagne, je découvre encore des détails qui me rappellent Hailsham.Je dépasse l’angle d’un champ brumeux, ou, en 17BAT-019-AUPRÈS DE MOI TJRS 28/02/08 16.13 Page 18A U P R È SD EM O IT O U J O U R Sdescendant le flanc d’une vallée, j’aperçois au loin le fragment d’une grande maison, ou même un bouquet de peupliers disposés d’une certaine façon sur un versant de colline, et je pense : « C’est sans doute ça ! Je l’ai trouvé ! C’est vraiment Hailsham ! » Puis je comprends que c’est impossible, je continue ma route, et mes pensées dérivent.Il y a en particulier ces pavillons.Je les repère partout, à l’extrémité de terrains de sport, petits bâtiments blancs préfabriqués avec une rangée de fenêtres étrangement placées en hauteur, blotties sous les combles.Je pense que dans les années cinquante et soixante on en a construit un grand nombre, et le nôtre date sans doute de cette époque.Si j’en dépasse un en voiture, je me retourne pour le fixer le plus longtemps possible, un jour je vais avoir un accident, mais je ne peux pas m’en empêcher.Il n’y a pas si longtemps, je traversais une partie déserte du Worcestershire et, à côté d’un terrain de cricket, j’en ai vu un qui ressemblait tant à celui de Hailsham que j’ai fait demi-tour pour l’examiner de plus près.Nous aimions notre pavillon de sport, peut-être parce qu’il nous rappelait les charmants cottages où habitaient toujours les personnages des livres d’images de notre enfance.Je nous revois chez les Juniors, sup-pliant les gardiens de donner le cours suivant dans le pavillon, et non dans la salle habituelle.Ensuite– à douze ans, bientôt treize –, en Senior 2, le pavillon était devenu le lieu où se réfugier avec ses meil-18BAT-019-AUPRÈS DE MOI TJRS 28/02/08 16.13 Page 19A U P R È SD EM O IT O U J O U R Sleurs amis quand on voulait échapper au reste de Hailsham.L’endroit était assez spacieux pour accueillir deux groupes distincts sans qu’ils se gênent – l’été, un troisième groupe pouvait traîner dans la véranda.Mais, dans l’idéal, vous et vos amies souhaitiez avoir l’endroit pour vous, aussi vous deviez souvent lou-voyer et argumenter
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