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.Il ne comprenait pas que je gâche mon talent.Il m’a même convoqué un jour pour me le dire dans son bureau du premier étage qui ressemblait à une grotte d’explorateur.On disait qu’Abott y dormait parfois pour ne pas croiser sa femme chez lui.Au point qu’elle était persuadée qu’il avait une maîtresse.Abott, une maîtresse, quel manque de discernement ? Mais ce n’était pas mes oignons.Difficile pour un type de ma taille de trouver un endroit pour s’asseoir dans son cagibi.— Vous savez, Kenner, que vous avez des moyens intellectuels très au-dessus de la moyenne, alors qu’est-ce qui ne va pas chez vous ?C’était une question très embarrassante qui n’appelait pas de réponse selon moi.— J’en sais rien.— Vous vous rendez compte de ce que vous pourriez devenir si vous vous y mettiez vraiment ? Tiens, dites-moi ce que vous rêvez de faire plus tard ?— Plus tard ?J’ai souri, pour la première fois depuis longtemps, et j’ai remonté mes grosses lunettes carrées, un préalable avant que je me mette à parler qui ne m’a jamais quitté, puis j’ai lâché :— Je n’ai jamais pensé à plus tard, monsieur Abott, il y a quelque chose en moi qui me dit qu’il n’y a pas de plus tard.— Mais vous avez bien des envies, Kenner ? Non ?— Des envies ?Répondre me coûtait.Pas par rapport à la question.C’est plutôt que je voyais debout devant moi cet avorton avec son nœud papillon défraîchi qui dormait parfois dans ce gourbi pour fuir sa femme et que je ne lui trouvais aucune légitimité à m’entretenir de mes problèmes et encore moins à leur trouver une solution :— Vous n’êtes pas la bonne personne pour parler de ce que je dois faire ou pas, monsieur Abott.Il a ajusté son nœud papillon.— Et pourquoi cela, Kenner ?Je l’ai regardé avec intensité sans rien dire et sans bouger.Il s’est mis à se balancer d’une jambe sur l’autre et puis je l’ai vu se décomposer.Ma masse lui barrait l’accès à la porte et je restais là, immobile et muet.Quand je l’ai vu commencer à transpirer, j’ai considéré que cela avait assez duré, je me suis levé et je suis sorti.Il n’a plus jamais été tenté de me parler de mon avenir.Je pense qu’il a donné le mot aux autres profs car aucun d’eux n’a jamais essayé de m’entreprendre sur le sujet.À qui peut-on parler de cet ennui qui vous submerge du soir au matin, qui entame méticuleusement votre volonté au point de rendre toute action mort-née ? Je ne me suis jamais fait un seul ami les deux années que j’ai passées à North Fork.Je n’avais jamais envie de parler à quiconque et cela devait se voir au point qu’on m’évitait soigneusement.Je savais que j’étais de loin en loin un sujet de médisance mais je n’en avais rien à faire.J’étais insensible au jugement des autres, à leurs simagrées, à leur petite vie sans gloire dans cette ville qui se flattait d’être le nombril de la Californie.La guerre du Vietnam débutait et je m’y serais bien engagé pour faire honneur à mon père, un grand combattant de la Seconde Guerre mondiale.Mais j’avais une peur viscérale de la violence physique.Chaque fois qu’une bagarre éclatait au collège, je remerciais le Créateur que ma masse m’en tienne éloigné.Je me serais dégonflé devant le moindre petit mec décidé à me dérouiller.Mes fantasmes sur les filles étaient mon seul lien avec cette communauté.Un espace de liberté, une zone de non-droit.Je faisais ce que je voulais d’elles dans mes rêves et personne ne pouvait rien me dire.Les fantasmes mènent le monde.La plupart des gens qui font l’amour ne sont pas présents dans leur tête avec la personne qu’ils sont en train de posséder, j’en suis persuadé.Je prenais ma faculté à fantasmer comme une sorte de supériorité parce que dans mes rêves je me les suis toutes tapées, des profs aux élèves, des belles aux moches que je trouvais le moyen de réenchanter et, sans qu’elles le sachent, je leur procurais des émois qu’aucun être de chair et de sang ne pouvait leur proposer.Je voyais dans le regard de toutes ces filles la gêne qu’elles avaient d’avoir été longuement possédées par moi.Mes fantaisies imaginaires me suffisaient
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