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.Grand- mère Croul tâta la figure et les bras ; ils étaient complètement rigides.—Est-ce une crise ? interrogea l'apprenti.La vieille femme appuya sa main contre le cou du forgeron mais ne put sentir le pouls.Elle demanda au gamin, qui s'empressa de le lui apporter, le pichet d'eau.Elle le porta à son nez et eut un haut-le-cœur devant l'odeur âcre.—D'où provient cette eau ? demanda-t-elle.L'enfant désigna le gros tonneau au fond de la cour.Grand-mère Croul regarda autour d'elle, ramassa une hache et se tourna vers les hommes qui l'avaient suivie dans la cour.— Défoncez cette barrique ! cria-t-elle.—Pourquoi ? Que se passe-t-il ? s'exclama la femme du forgeron.—Défoncez-la ! répéta grand-mère Croul.Que Dieu me pardonne, Maîtresse, dit-elle en tapotant l'épaule d'Isabella, mais je crois que votre mari a été empoisonné.Des protestations incrédules accueillirent sa déclaration.— Empoisonné ?Chope en main, Adam l'apothicaire s'avança dans la flaque de lumière.— Qu'est-ce qui vous permet de l'affirmer ?Adam et la sage-femme ne s'aimaient guère.—Je sais reconnaître les effets de la belladone, rétorqua cette dernière.Et si vous ne me croyez pas, pourquoi ne pas boire cette eau vous-même ?— Mais qui l'y aurait versée ? questionna le gamin.Grand-mère Croul se releva et se dirigea vers le tonneau.La lumière chiche l'obligea à se pencher.Elle ne détecta rien à travers le couvercle grillagé, mais, à vrai dire, tant d'odeurs s'élevaient des flaques d'urine et des tas d'ordures de la cour.— Petit ! appela-t-elle.L'apprenti se précipita.— Qui a rempli le pichet ?— Moi, Maîtresse, répondit-il.— Et tu le lui as apporté ?— Oui, mon maître l'attendait.—Alors, si quelqu'un boit de cette eau, il suivra le même chemin que ton maître, expliqua-t-elle en lui tendant la hache pour qu'il fracasse la tonne.Un cri épouvantable retentit dans la cour éclairée à présent par des hommes munis de torches enduites de poix.Grand-mère Croul clopina sur les pavés aussi vite que faire se pouvait, passa devant la dépouille du maréchal-ferrant et entra dans la cuisine.Isabella, le vin d'une coupe répandu autour d'elle, se convulsait sur le sol, tressautait et donnait des coups de pied, en proie à des douleurs de ventre.Horrifiée, grand-mère Croul ne pouvait que contempler la scène.La table de bois, dressée pour le souper, était chargée de plats, de couteaux, d'un pot à eau et d'un pichet de vin en étain muni d'une anse imposante et d'un bec imitant celui d'un canard.Une servante blême, les mains aux joues, regardait sa maîtresse à terre qui hurlait etcrachaitconvulsivement.D'autrespersonnesarrivèrent.Grand-mère Croul s'agenouilla et essaya de maîtriser l'épouse du forgeron qui semblait étouffer.La vieille femme tenta de glisser un doigt dans la bouche d'Isabella mais s'empressa de le retirer, le souffle coupé par une violente morsure.Isabella perdait à présent conscience.Les paupières palpitantes, elle voulut se redresser pour vomir, mais retomba sur le dos.Tout espoir était perdu.Grand-mère Croul ramassa la coupe de vin, et, la humant, perçut une forte odeur d'amande qui la fit reculer de dégoût.Kathryn Swinbrooke, médecin de Cantorbéry, récente épousée de Colum Murtagh, gardien des écuries royales de Kingsmead en la même ville, baissa les yeux sur les deux cadavres nus.Ils étaient allongés sur des planches dans le dépositaire du manoir de Walmer, juste derrière la chapelle Saint-Fiacre, patron des jardiniers.Kathryn poussa un nouveau soupir et porta le pomander1 à ses narines.Bien que la mort fût récente, il émanait pourtant déjà des corps les effluves insupportables du trépas et de la corruption.Elle s'éloigna et jeta un regard par l'étroite fenêtre.L'épaisse mante qui couvrait ses épaules et les braseros parfumés disposés au fond sous le toit atténuaient l'effet du vent froid.Elle se fit la remarque que la nuit touchait à sa fin et que le soleil se lèverait un peu plus tard.Elle ferma les yeux.Elle était mariée depuis quelques jours avec l'amour de sa vie ; elle était censée savourer les multiples délices des premiers jours de son histoire conjugale et non examiner les malheureuses victimes de quelque assassin.—Non, je ne l'admets pas, murmura-t-elle.Elle se retourna, surprise, en se rendant compte qu'elle venait de parler à haute voix.Le père Clement, ayant mal interprété ses paroles, répondit :—Je reconnais que c'est difficile à croire.Un pauvre homme tué dans sa forge et son épouse empoisonnée dans sa propre cuisine.Comment ces affreux événements ont-ils pu se produire ?Kathryn scruta ce prêtre naïf dans sa bure marron et ses solides sandales.Il se tenait entre les grabats de bois, une chape de laine noire sur les épaules d'où émergeait son long cou décharné.Pour Kathryn, il avait tout d'un ange avec ses yeux bienveillants, sa bouche sensible et ses mèches de cheveux blancs qui encadraient ses joues creuses.—Je leur ai administré les derniers sacrements, n'est-ce pas, Amabilia ? dit-il en s'adressant à sa sœur et gouvernante.Petite femme replète, Amabilia portait une robe fauve en futaine.Une guimpe entourait son visage rond et serein.Ses grands yeux noirs rappelaient les prunes de Damas et son nez était retroussé au-dessus de ses lèvres joyeuses.Le froid lui avait rougi les joues ; elle ne cessait de tirer sur ses mitaines noires et de souffler sur le bout de ses doigts.Elle laissa retomber ses mains et sourit à Kathryn.—Le père et moi étions absents quand cela s'est produit.Nous étions en visite chez un fermier de l'autre côté de la baie et ne sommes rentrés qu'à la nuit.Elle cilla et hocha la tête.—Nous ne pouvions en croire nos yeux.On avait déjà apporté les dépouilles sous le porche de l'église Saint-Swithun.J'ai allumé des cierges.Le père les a bénies et ointes.Elle baissa la voix.—Puis nous avons envoyé un message à Lord Henry, ajouta-t-elle comme après coup.Kathryn jeta un coup d'œil au seigneur du manoir, qui montait la garde sur le seuil.En dépit de l'heure matinale, Lord Henry était habillé comme pour se rendre à la Cour.Sa chevelure blonde, sa moustache et sa barbe étaient taillées avec soin et peignées.Il avait revêtu une cotte-hardie en velours vert ornée de losanges dorés, un haut-de-chausses pourpre enfoncé dans des bottes de cuir fauve et portait, autour de sa taille fine, une ceinture brodée à boucle d'argent à laquelle était suspendu un fourreau bordé d'or.« Le parfait courtisan », se dit la jeune femme.Lord Henry était fort élégant, jouant d'une main avec la boucle de sa ceinture et, de l'autre, tambourinant un petit air sur la gaine de sa dague.—Monseigneur ?Lord Henry sortit de son anxieuse rêverie.Il avait des yeux bleus des plus étranges qui donnaient à Kathryn l'impression qu'il la transperçait du regard.—J'ai demandé que l'on apporte les corps ici, expliqua-t-il.J'ai pensé que vous pourriez nous aider.—Ils sont morts ; ils ont été empoisonnés, déclara Adam l'apothicaire.Il avait décidé de se joindre au cortège qui allait au manoir et s'avança tel l'avocat de ces cadavres défigurés.Adam avait conçu une aversion immédiate pour Kathryn et ne se souciait pas de la cacher.Le courroux plissait son visage maussade encadré de longs cheveux noirs et il ne cessait de se tapoter la panse comme pour refréner son agitation
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